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22 mai 2018

Outland

Adolescent, je feuilletais régulièrement le Mad-Movies numéro 100 qui comprenait un long dossier spécial consacré aux "100 meilleurs films fantastiques" selon la rédaction du magazine. Je consultais ce dossier avec amour et même avec sérieux, en notant les films déjà vus et en retenant bien les noms de ceux que je souhaitais voir au plus vite. Parmi ces 100 films, figuraient quelques titres étonnants, moins évidents, des invités surprises pourrait-on dire. Je cite, la plupart de mémoire : La Grande Menace de Jack Gold, Wolfen de Michael Wadleigh, Les Clowns tueurs venus d'ailleurs de Stephen Chiodo, C'était demain de Nicholas Meyer, L'Amour avec des gants de Maurizio Nichetti, Appel d'urgence de Steve de Jarnatt, Truly, Madly, Deeply d'Anthony Minghella ou encore Messe Noire d'Eric Wetson.




Depuis, j'ai pu découvrir quelques-uns de ces films et j'avoue avoir souvent été déçu tant mon attente et mes espoirs étaient peut-être devenus trop grands au fil du temps. Pourtant, Appel d'Urgence est un petit "post-nuke" au charme réel, Wolfen est un film de loup-garou urbain au scénario inspiré et Messe Noire est une série b qui contient quelques fulgurances gores marquantes et originales. Malgré tout, force est de reconnaître qu'aux côtés des chefs-d'oeuvre de John Carpenter, Tobe Hooper, Steven Spielberg ou William Friedkin, ces films demeurent d'une importance bien plus modeste. Mais c'était aussi le charme de ce dossier spécial, Mad-Movies y avait mêlé avec malice des incontournables, des classiques et, évidemment, des absents de marque qui, à l'époque, avaient fait jaser. Et son intérêt résidait principalement dans ces titres plus obscurs qui titillaient forcément la curiosité de par leur présence aux côtés de grands films mieux connus, à la notoriété solidement établie.




Parmi ces films, il y avait aussi Outland de Peter Hyams, un titre qui m'intriguait tout particulièrement en raison de l'image qui accompagnait l'article : un astronaute en pleine crise de panique coincé dans son scaphandre. Cette image est issue de la première scène du film, qui nous présente une équipe de mineurs au travail sur Io, satellite de Jupiter exploité pour son minerai. Un incident incompréhensible survient alors : l'un des ouvriers se met à halluciner, perce volontairement sa combinaison et meurt à la dérive dans l'espace, après que sa tête a explosé dans un effet spécial digne du final de Total Recall. Bien décidé à comprendre ces incidents qui se répètent sur Io, un marshal fédéral (Sean Connery !) mène l'enquête, quitte à mettre sa propre vie en danger. Il lèvera peu à peu le voile sur un trafic de drogue parfaitement organisé et même encouragé par la grande entreprise gérant les exploitations minières, dans le but de décupler la productivité des ouvriers.




Vous l'aurez peut-être deviné à travers mon résumé de l'histoire : Outland est un véritable western spatial autour d'une vraie figure de shérif incarné par un très bon Sean Connery. A l'orée des années 80, Peter Hyams voulait réaliser un western mais, le genre étant passé de mode, les producteurs lui ont fait "tut tut tut". Il a ainsi simplement délocalisé son histoire, de l'Ouest jusqu'aux confins du système solaire, sur une minuscule planète, Io, qui devait même donner son joli nom au film. Le scénario signé Peter Hyams s'inspire d'ailleurs nettement du fameux film de Fred Zinneman, Le Train Sifflera Trois Fois. On y retrouve également un shérif seul contre tous devant faire face à la corruption et à la lâcheté ambiante. Si le film de Zinneman était une dénonciation déguisée du maccarthysme, Outland s'avère être une critique bien sentie du capitalisme à tout rompre et pointe du doigt les méthodes inhumaines d'une sorte de multinationale futuriste obnubilée par le profit.




Bien que la direction artistique d'Outland soit bonne et que le film ait une certaine allure, il faut reconnaître qu'il a aujourd'hui un peu vieilli. L'alternance entre des scènes d'incidents causées par la drogue et celles nous montrant l'avancement de l'enquête du marshall est un peu répétitive dans la plus grande partie du film. Le dernier tiers manque de rythme et peine malheureusement à maintenir l'attention. En fin de compte, le film de Peter Hyams trouve surtout son intérêt dans le beau personnage auquel Sean Connery parvient à donner vie, un homme qui a atterri là, au fin fond de l'univers, par dénigrement, désireux de prouver qu'il vaut mieux que ça en allant au bout de ses convictions. La plus belle scène du film est celle où, en lent travelling avant cadrant le visage de l'acteur, Sean Connery exprime sa volonté de faire ses preuves, de donner un sens à sa présence sur Io. La relation d'amitié et de confiance que son personnage construit peu à peu avec sa seule aide dans la station minière, la docteure jouée par une excellente Frances Sternhagen, est l'autre point fort du film. Quelques répliques teintées d'humour et une progression lente vers cette belle amitié nous font croire et nous attacher à ce duo original. Face à eux, Peter Boyle campe parfaitement un imbuvable homme de pouvoir, orchestrant sans aucun scrupule le trafic, et ses confrontations avec Sean Connery donnent toujours lieu à des scènes réussies.




Hélas, malgré des acteurs impeccables et toutes ces autres qualités bien réelles qui font de lui un film au demeurant sympathique, Outland m'a encore laissé un léger goût d'inachevé, moi qui voulais une nouvelle fois découvrir une véritable pépite sous-estimée du cinéma de genre. Ma quête des autres films non vus de la fameuse liste de Mad-Movies n'est pas terminée pour autant et j'ai par exemple toujours aussi hâte de découvrir Le Cercle infernal de Richard Loncraine dont l'aperçu présent dans le numéro spécial, une Mia Farrow effrayée en pleine séance de spiritisme, m'a toujours titillé...


Outland de Peter Hyams avec Sean Connery, Frances Sternhagen et Peter Boyle (1981)

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