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6 février 2018

George Washington

Cela faisait bien longtemps que je voulais voir George Washington, le premier long métrage du cinéaste américain David Gordon Green, auteur, à ses débuts, de quelques films indépendants très remarqués, à l'image du très chouette L'Autre Rive (dont je vous avais parlé avec un vif enthousiasme avant d'être immédiatement douché par les miteux Snow Angels et Joe, sans parler du très anecdotique Prince of Texas). A sa sortie, très confidentielle, en 2001, son premier film a également été accueilli à bras ouvert par les critiques US et a reçu son lot de prix et de nominations. Il nous propose de suivre le quotidien d'une petite bande de jeunes noirs dans une ville désolée du sud des Etats-Unis pendant un été marqué par un accident terrible après lequel chacun devra apprendre à vivre.




Peut-être ai-je trop vu de films de ce genre, peut-être m'en suis-je lassé et peut-être aurais-je été totalement séduit par celui-ci si je l'avais vu il y a 10 ans. A mes yeux, George Washington porte, en germe, toutes les limites du cinéma de David Gordon Green, qui se révéleront au grand jour dans ses films suivants. Un cinéaste qui se regarde beaucoup filmer, qui croit peut-être un peu trop au pouvoir de fascination qu'exerce ces plongées dans l'Amérique profonde sur ses spectateurs et qui, finalement, n'a pas tant de choses que ça à dire et à montrer.




Et pourtant, il y a de quoi être sous le charme. La photographie signée Tim Orr (mentionné dès le premier panneau du générique final aux côtés du réalisateur/scénariste, comme pour souligner son importance) est de toute beauté et participe à nous installer dès les premières minutes auprès de ces jeunes, dans la moiteur et la langueur estivales de leurs déambulations et de leurs journées sans but. Les cadres léchés, attentifs aux visages des acteurs tous irréprochables, et la mise en scène très appliquée de David Gordon Green évoquent encore une fois les premiers films de Terrence Malick, eux aussi empreints de cette saveur particulière du southern gothic, de cette lumière singulière. La scène dudit accident, moment charnière du film, est un passage bien négocié par le cinéaste, qui parvient parfaitement à nous faire ressentir cet étrange malaise suscité par ce basculement inattendu.




En bref, tous les ingrédients semblent bel et bien réunis pour se laisser agréablement porter et, au bout du compte, pour s'enthousiasmer sans réserve pour une nouvelle pépite du cinéma indépendant américain. Mais, progressivement, je me suis désintéressé de tout ça. La voix off du petit garçon nous accompagnant dans l'histoire m'a paru de plus en plus affectée, superflue, pénible. Le film m'a semblé manquer d'humilité, chichiteux, ne réussissant pas à véritablement capter cet état de douce ou amère mélancolie, typique de l'adolescence, qu'il développe avec superficialité, comme si c'était acquis. David Gordon Green ne réussit guère à donner vie à des personnages marquants, à dresser des portraits prégnants d'adolescents forcément familiers et évocateurs. Même le personnage principal, dont le surnom fait office de titre, et qui doit gérer sa culpabilité puis un statut de héros inattendu, ne passionne jamais. Laborieux et frustrant, George Whasington n'est tout de même pas un mauvais film, mais j'ai dû trop en voir des comme ça, et je ne suis guère étonné du tournant nauséabond pris par la carrière de son réalisateur par la suite.


George Washington de David Gordon Green avec Candace Evanofski, Donald Holden et Paul Schneider (2000)

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