Pages

14 novembre 2017

Wind River

Le corps d'une jeune fille est retrouvée dans la réserve indienne de Wind River, Wyoming. Cory Lambert (Jeremy Renner), un chasseur connaissant ce vaste territoire enneigé comme sa poche, se met au service de Jane Banner (Elizabeth Olsen), une jeune agente du FBI inexpérimentée, pour enquêter sur le meurtre. Ils devront faire équipe, dans un milieu hostile et délaissé, ravagé par la violence et l’isolement. C'est un nouveau scénario simple, limpide et efficace que nous propose encore Taylor Sheridan, après le déjà remarquable Hell or High Water (Comancheria). Parce qu'il traite d'un sujet, la cause amérindienne, qu'il jugeait trop délicat pour le laisser entre les mains d'un autre, Taylor Sheridan s'est cette fois-ci également chargé de la réalisation. Wind River marque donc son retour derrière la caméra, lui qui n'avait signé qu'un petit film d'horreur méconnu en 2011. Un retour marqué de succès puisque ce thriller gelé a été très chaleureusement accueilli à sa sortie et, pour une fois, les éloges étaient tout ce qu'il y a de plus mérités !




Alors certes, Taylor Sheridan pourrait oser davantage, en tirant notamment mieux partie des décors somptueux du Wyoming, vastes étendues immaculées particulièrement cinégéniques et propices à toutes les inventions. Il pourrait chercher plus franchement à développer une ambiance marquante, en nous faisant plus ressentir l'isolement des personnages, en nous rapprochant de leurs sensations. Mais Taylor Sheridan atteste d'autres qualités, bien rares aujourd'hui et d'autant plus appréciables. Sa mise en scène se révèle à l'image de son écriture : simple et épurée. Il fait preuve d'un véritable talent pour nous raconter son histoire avec efficacité, clarté, concision et sobriété. Il ne s'éparpille pas, se concentre sur l'essentiel et s'intéresse réellement à des personnages qu'il parvient à faire exister sans souci, bien aidé par un duo d'acteurs irréprochables.




Jeremy Renner, que je ne portais pas spécialement dans mon cœur pour sa filmographie trop chargée en blockbusters sans âme, trouve ici son meilleur rôle dans la peau de cet homme introverti et endeuillé. Quant à la belle Elizabeth Olsen, elle est parfaite en agente du FBI sortant de l'école qui se découvre un courage et une assurance insoupçonnés alors qu'elle mène sa toute première enquête. On a aucun mal à s'attacher à ces deux-là, nous les suivons avec plaisir. On se met même presque à espérer les revoir bientôt pour de nouvelles aventures, comme s'ils étaient les héros d'une série de polars teintés de nature writing parus chez Gallmeister auxquels le film fait penser. Taylor Sheridan a également le mérite de ne pas parasiter son scénario d'une romance factice entre les deux vedettes. Celle-ci s'amorce à peine à la toute fin, c'est à dire à un moment où le spectateur s'en acoquine parfaitement, tant le couple a fait preuve jusque là d'une jolie alchimie et que leur rapprochement paraît naturel. 




Wind River se distingue également par une vraie intelligence dans sa construction. Choisissant de ne pas créer un suspense artificiel qu'il n'aurait pas pu tenir bien longtemps, Taylor Sheridan lève le voile sur la mort de la jeune fille de façon assez inattendue, lors d'un flashback idéalement placé. Cette scène adroite et très bien gérée débouche qui plus est par un brutal retour au présent et une fusillade aussi soudaine qu'impressionnante, où les corps ont vite fait de tomber sur la neige. A noter également une apparition saisissante quand, en pleine traque, le chasseur campé par Jeremy Renner tombe sur le terrier de trois couguars majestueux, venant nous rappeler la bassesse des hommes de par leur seule présence tranquille et supérieure. Avec cet excellent film, Taylor Sheridan s'impose donc définitivement comme un auteur à suivre de très près.


Wind River de Taylor Sheridan avec Elizabeth Olsen, Jeremy Renner, Jon Bernthal, Kelsey Chow et Graham Greene (2017)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire