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5 décembre 2016

Sully

Gros point positif : le film se termine plus tôt qu'on ne le croit. Et quand le film est à ce point merdique, c'est un sacré point positif. C'est même un miracle que ça dure 1h30 tant Eastwood n'a strictement rien à raconter. C'est tout simplement hallucinant le nombre de conneries qu'on peut lire dans la presse au sujet de ce film. C'est à se dégoûter définitivement de la critique cinéma qui ne sait plus quoi déblatérer pour lécher les pompes d'un Eastwood sénile, en bout de course, plus naze que jamais. On entend parler de "film d'action", de "mise en scène à la maîtrise olympienne" (merci Malausa, le malotru), d' "image magnifique", de "beauté plastique", "nous sommes - le mot est adéquat - transportés" dans la merde ! Comment peut-on ? Comment peut-on écrire toutes ces conneries à propos d'un pareil film ?


"J'en suis à mon deuxième film !" Non mec, t'en as déjà 100 derrière oit.

Sully cumule toutes les pires tares du cinéma américain post-11 novembre : cette image perpétuellement grise, ces héros fins et discrets d'une histoire vraie, ce peuple de New-York sanctifié, ces avions qui tutoient les buildings, ce Times Square filmé comme si c'était la 8ème merveille du monde alors que c'est peut-être l'endroit le plus hideux sur terre, objectivement, sans parler des personnages pendus à leur téléphone dans 3 scènes sur 2 et du rôle de la femme, toujours là pour cirer les pompes du capitaine. Le film est vide de tout, se basant sur l'histoire d'un amerrissage sans conséquence, et prenant pour héros un type parfait qui démontre sans se fouler qu'il a agi au top. Eastwood est infoutu d'insuffler le moindre sentiment de suspense et filme ses scènes de bravoure comme un vieux papy sous morphine. La fin du film, c'est le clou, avec ces images du véritable équipage qui vient s'entre-branler sur fond de générique, chaque rescapé citant son numéro de siège face caméra avec des gueules enfarinées. Eastwood, le patriote, celui qui devrait s'appeler Clint Westwood tant il est à l'ouest, nous avait déjà fait le coup à la fin de l'infâme Americain Sniper.


 
Combien de films de merde as-tu mis en boîte ce mois-ci pépé East ?

Il y a quand même une belle séquence à sauver dans ce merdier d'ennui, de platitude et de laideur. Un truc à retirer des flammes de ce brasier du cinéma ricain, qui crame sous nos yeux au rythme des cuts d'Eastwood, que le vieux croit bon de scander à coups de grands bruits de moteur, y compris quand il n'y a pas le moindre aéroplane dans le champ. Un truc à tirer des eaux fades dans lesquelles Eastwood se noie sous nos mirettes inquiètes, sans oublier, entre deux remontées à la surface laborieuses, de nous asséner ses petites doubles-croches, penché, à moitié mort, sur son orgue tire-larmes à la noix. C'est la scène de procès où les juges de Sully lui montrent une bonne dizaines de simulations qui prouvent qu'il a fait le con en allant larguer son planeur sur la flotte glacée de l'Hudson (quand bien même il n'y a eu aucune victime ! des gens passent des jours à harceler un vieux briscard doué de ses dix doigts de pied pour rien, c'est passionnant) alors que 18 aéroports vides l'attendaient les bras en croix aux quatre coins. Premier essai : un duo mixte prend place dans le cockpit et parvient les doigts dans le nez à poser l'engin tel une plume (clin d’œil à Forrest Gump) sur la piste 13 ou 14 (on s'en tape) de La Guardia. 2ème essai : un enfant aveugle fait de même, les yeux bandés et des bouchons dans les oreilles, allant atterrir comme une fleur à Terterboro, non loin. 3ème essai : un macaque prend les commandes et gère l'atterrissage sur le toit d'un building, sans le moindre heurt, tout en se grattant le cul plein cadre. 4ème essai : le cockpit est vide, le mode pilote automatique est enclenché et le zinc, tous moteurs éteints, fait un looping sur lui-même puis va se poser comme une planche de surf devant le domicile de chaque passager pour les ramener chez eux un par un avant de retourner à bon port. 5ème essai : un moko collé au manche de l'A320 s'en sort très bien, et pose le ventre de l'appareil sans la moindre éraflure, tout en adressant un clin d’œil à un Sully humilié. Dernier essai : Airbus fait appel au commandant du Costa Concordia pour voir comment il s'en tire aux manettes d'un paquebot volant : là encore, du velours, le pilote effleure bien un ou deux rochers mais il finit diplômé et distribue sous les yeux médusés de l'assemblée des pizzas aux lasagnes à tous les passagers du vol, comblés. Au final, Sully, accablé par toutes ces démonstrations de sa profonde nullité, en réchappe en répliquant qu'aucun n'avait pour copilote ce con de Aaron Eckhart.


"Combien d'entrées pour Jersy Boyz, Clint ? - Deux ! - Wesh !"

Dans ce naufrage, il n'y a bien que Tom Hanks qui, littéralement, surnage, d'où le succès de l'amerrissage. L'acteur est époustouflant. Il remplit les critères définis par Max Weber et Alexis de Tocqueville : charisma, bravoure et sagacité. Il continue d'écrire sa légende, même quand il est sali par la puanteur totale des films dans lesquels il joue. L'acteur est sur un nuage, notamment lors de la principale scène d'amerrissage (car Eastwood la remontre au moins 8 fois - exactement la même), où son jeu de regards parvient à exprimer en 4 minutes tout ce que l'humain a pu éprouver depuis son arrivée sur terre : un mélange de culpabilité et d'auto-accusation. Le ver était dans la pomme. Dans la pomme de Tom Hanks, plus grand acteur de sa génération (derrière Denzel). Tom Hanks tutoie les cieux malgré un souci d'essieux. Tout de même un peu curieux qu'un film soit ainsi consacré à un procès qui se termine sur un éclat de rire général et sur des tapes dans le dos entre procureurs et accusés. 


Sully de Clint Eastwood avec Tom Hanks, Aaron Eckhart (premier film dont il sort indemne) et Laura Linney (2016)

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