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20 août 2015

James et la pêche géante

Henry Selick n'a pas seulement inspiré le dessinateur Maurice de Bevere, aka Morris, le père de Lucky Luke, pour le design de son fameux croque-mort. Henry Selick a également réalisé L’Étrange père Noël est une ordure de Monsieur Jack et, on ne le rappelle jamais assez, Jacques et la pêche géante, fabuleux film d'animation réalisé image par image, avec une patience et une minutie incroyables. Par erreur, on a longtemps assimilé cette œuvre unique en son genre à des produits purement commerciaux comme Gang de requins et Little Nemo, tristes dessins animés en milieu océanique fait pour séduire le jeune public littoral amateur de dauphins. Il est grand temps de rétablir la vérité... Attention, il s'agit ici d'une pêche géante, le fruit que l'on aime savourer accompagné d'un verre de rosé bien frais, et non d'une partie de pêche du tonnerre, celle qui consiste à capturer des animaux aquatiques (poissons, mais également et notamment crustacés et céphalopodes - dont le fameux brochet-bière, croisement insolite d'un brochet et d'une canette de 1664, qui vit tranquillement dans les eaux douces du plan d'eau du Vieil-Baugé) dans leur milieu naturel (océans, mers, cours d'eau, étangs, lacs, mares, flaques). Selick met en scène une très grosse pêche, que ça soit dit, une bonne fois pour toutes.




Pour que cet amalgame tragique appartienne définitivement au passé, revenons sur le synopsis du chef d’œuvre d'Henry Selick. La morne existence de James sur la côte anglaise subit un sacré bouleversement lorsque ses parents sont écrasés net par un rhinocéros échappé d'un parc animalier. Orphelin, James part vivre avec ses deux horribles tantes : Sponge Bob et Belle Piquette. Installé dans le Yorkshire, James fait la connaissance d'un vieillard sénile qui, pour l'amadouer, lui donne des langues de crocodile magiques. Mais, en rentrant chez ses tantes, James se ramasse en chemin et fait tomber toutes les langues au pied d'un arbre. Soudain, un fruit gigantesque apparaît dans l'arbre ! L'apparition de ce fruit énorme marque le début des aventures pour James, qui se lance alors dans un voyage initiatique au cours duquel il découvrira les vertus de l'entraide et de l'amitié.




On tient tout d'abord à saluer Henry Selick (salut, Henry) et ses distributeurs francophones ainsi qu'à souligner une nouvelle particularité propre à ce film étonnant. En France, l'énorme fruit magique est une pêche, mais sachez que la nature du fruit varie selon les pays ! De l'autre côté des Pyrénées (en Espagne...), le titre devient "José y la Naranja fatal", et l'histoire est un poil différente (plus gaie, selon certains). En version originale, le film s'intitule "Jack & the giant pineapple", pour une fin bien plus pessimiste. Pour l'exploitation wallisienne du film, cas unique : le fruit a été remplacé par une patate, met plus largement apprécié et consommé en quantité phénoménale par nos amis insulaires (le scénario, très minimaliste, prend ses distances avec Roald Dahl et se contente de nous montrer une patate, filmée sous tous les angles possibles, pendant 1h30). Plus étonnant encore, nos amis ukrainiens ont droit, quant à eux, à une belle pastèque. Ces variations s'expliquent sans doute par le souci de se mettre à la portée du jeune public de chaque pays. C'est bien connu : les routes d'Ukraine sont véritablement jonchées de pastèques, l'équivalent de nos garennes en France, voire de la pêche, un fruit très familier, dont le choix s'avère donc très judicieux aussi.




Entre l'abricot, la pêche et la poire, notre préférence va à la pêche. L'abricot est un super fruit ... d'été ! La poire a plusieurs qualités : celle de nous rappeler la forme majestueuse des plus beaux attributs féminins, et celle de pouvoir se préparer en dessert, avec une généreuse coulée de chocolat chaud. Mais la pêche a des avantages indéniables (qu'on ne peut échanger contre quelques deniers). On peut se faire une pêche "comme ça", pour le plaisir et à toute heure. Pensez à ce jus qui vous suinte des mains et, surtout, à ce noyau. Mon morceau préféré, le noyau. Infini... Infiniment rempli de pêche. Ça fait travailler la langue, les dents, les muscles de la mastication... Un vrai régal. Un éveil des sens ! Et, on l'oublie trop souvent, la pêche peut aussi faire office d'entrée de premier choix : la pêche au crabe, par exemple. Vous m'en direz des nouvelles. Testez donc la pêche au crabe. Y'a que ça de vrai... L'expression "ça fout la pêche" ne vient pas de nulle part...


James et la pêche géante d'Henry Selick (1996)

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